Parlez-nous un peu de vous Barnett Chevin...
D’où vous est venue cette passion pour l’écriture ? Je crois avoir toujours aimé écrire et mon plus vieux souvenir est lorsque mes parents avaient acquis une vieille machine à écrire « Underwood ». Je me souviens encore de ses touches mécaniques et de l’odeur de l’encre. Mon grand-père et mon père étaient des lecteurs assidus. Ce dernier a d’ailleurs une collection de livres SF à faire pâlir les plus grands collectionneurs. Le parfum des vieux livres a sans doute contribué à faire que j’écris aujourd’hui. Quels sont les auteurs qui vous ont inspiré(e) ? Je risque de ne pas être très original. Bien sûr il y a l’incontournable Stephen King, mais j’ai particulièrement été impressionné par « Le parfum » de Patrick Süskind — je suis un indécrottable olfactif — et « 1984 » de George Orwell. Je regrette presque de ne plus avoir la chance de les lire pour la première fois. Lovecraft est sans doute l’auteur qui marque le plus mes récits même si je ne rechigne pas à mimer le style de Poe. J’ai une vision assez cinématographique de l’écriture. Lorsque je pense à une nouvelle, je la tourne mentalement pour y placer mes personnages et leurs situations. Je n’exclue jamais de m’inspirer de films très graphiques comme Matrix, Le parfum ou de réalisateurs comme Kubrick ou Nolan. Parmi toutes vos histoires, de quel(s) personnages êtes vous le plus proche ? Sans aucun doute « Nicolas Dante » (« Les saveurs », délires fantastiques des éditions Sombres rets et « Cuistot Max », Moisson d’épouvante 2 des Éditions Dreampress). C’est un homme guidé par ses sens et non par son esprit. Bien sûr, je n’ai pas les mêmes travers que lui (rires), mais j’aime bien cet enfant qui arrivait à briller en société alors que tout l’en empêche et qui finalement gâche son génie par ses actes. J’aime beaucoup Harry Callaghan (référence aux vieux films de Clint Eastwood), un inspecteur entraîné dans la folie et le surnaturel. Malheureusement, aucune des nouvelles dans lesquelles il apparaît n’a encore trouvé d’éditeur. Que racontait la première histoire que vous ayez écrite ? Ce n’était pas du tout de la SF et encore moins de l’épouvante. Je devais avoir onze ou douze ans et c’était un polar. C’est un genre que j’affectionne beaucoup, mais dont je ne possède pas encore tous les codes. Je l’avais écrite sur la machine « Underwood ». Mon premier roman était Fantasy et ma première nouvelle « moderne » (écrite il y a moins de dix ans), est très SF. Elle évoque un homme happé par la technologie. Une histoire sombre, très ancrée « Matrix », et sans dialogue. Quelle histoire à eu le plus de succès ? Cela ne fait pas beaucoup de temps que je suis réellement publié (deux ans), parce que je n’avais jamais pensé que ce je rédigeais pouvait intéresser quelqu’un. Je l’ai fait par défi au début. Celle où j’ai eu les meilleures critiques est sans aucun doute « Les saveurs » de l’anthologie « Délires Fantastiques » aux éditions Sombres rets. Un autre récit intitulé « Mélancholia » dans l’anthologie « Créatures » publié aux éditions Otherlands avait retenu l’attention du jury du prix Masterton. Malheureusement, je n’ai pas été le finaliste. Comment réagissez-vous face aux critiques négatives ? Elles sont nécessaires dans le processus d’écriture. J’ai eu tant de nouvelles refusées que je serais incapable d’en faire une liste précise. Si je n’avais pas eu de mauvais retour, je ne me serais jamais amélioré. J’essaye cependant de ne pas perdre mon âme en modifiant mon style afin de correspondre à des standards. Je pense que toutes les critiques négatives sont méritées et il y en a eu très peu qui m’ont paru injustes. Comment vous sentez-vous à l’approche de la sortie d’un de vos livres ? Fébrile. J’ai toujours peur, et cette crainte est très ancrée lorsque j’écris. Mon récit ne doit pas être ridicule et mal interprété. Ma béta lectrice, Élisabeth, m’aide beaucoup pour cela. Je suis très heureux lorsque je suis sélectionné. Bien sûr je suis fier, mais je suis content de partager mon univers avec les lecteurs. J’espère simplement leur transmettre un peu du plaisir que j’ai lorsque j’écris. |
Avec quel(s) auteur(s) aimeriez-vous travailler ?
Sans surprise et sans conteste Patrick Süskind. Je n’ai jamais trouvé d’autres auteurs capables de susciter autant les sens que lui grâce à la force évocatrice des mots. Je serais curieux de voir comment travaille Stephen King et j’aurais aimé connaître Lovecraft, Poe, Balzac, Maupassant et Wilde, même si j’imagine que certains devaient être hantés par leurs textes. Cela a-t-il été compliqué de faire publier votre premier manuscrit et comment cela s’est-il passé ? Je suis nouvelliste dans l’âme. J’ai un roman de fantasy en 4 parties, mais je ne l’ai jamais proposé à la publication. Je participe essentiellement à des appels à texte pour parfaire mon style. Je vais me lancer dans des projets plus personnels dans un avenir proche. Avant de publier un livre, le faites-vous lire à des personnes de votre entourage ? Mes proches ne lisent mes textes que lorsqu’ils sont publiés. J’ai un fils de quinze qui aime beaucoup les histoires de Dante (sans doute parce que l’histoire parle d’un adolescent confronté aux problèmes de son époque). J’ai une béta lectrice, Élisabeth, qui m’aide beaucoup dans la correction de mes nouvelles. Sans elle, il est certain que je ne publierais pas autant. Ma famille, dont mes parents et mon épouse, est le lectorat qui m’est pour moi le plus cher, cependant leurs critiques ne sont pas assez acerbes pour que je m’améliore. J’ai une pensée toute particulière pour ma femme et mes enfants qui sacrifient beaucoup pour me permettre de coucher sur le papier toutes ces histoires. Sans eux aussi rien de tout cela n’existerait. Si vous deviez publier un livre, quel genre serait-ce ? Toujours du fantastique, je ne me sens pas capable d’écrire autre chose. Mes histoires sont plutôt très noires et ne se terminent pas souvent bien. Comme la vie finalement (rires). J’ai très envie d’écrire un roman sur une histoire plus étoffée autour de Nicolas Dante qui mettrait en exergue les cinq sens. J’ai encore des centaines d’idées dans la tête. Tout est propice au récit chez moi. Avez-vous envie de publier un livre ou préférez-vous continuer d'écrire des nouvelles ? Je crois que je resterais toujours nouvelliste. Ce format me plaît beaucoup parce qu’il impose une chute et l’obligation de camper très rapidement les personnages. Et pourtant même si l’écriture est courte, elle permet d’imaginer des mondes très riches. Quels sont vos projets ? J’en ai beaucoup. La publication d’un recueil de nouvelles devrait voir le jour l’année prochaine. J’ai aussi sous le coude un livre regroupant plusieurs histoires à propos d’une maison hantée. C’est une publication qui je l’espère sera très graphique et me permettra de répondre à une autre passion, le dessin. Je regarde toujours, très attentivement, les appels à texte pour continuer à écrire des nouvelles selon des critères définis. Cela me semble nécessaire pour continuer à améliorer mes récits. Je vais aussi peaufiner mon texte Fantasy et j’ai quelques surprises encore en réserves. Pour ceux qui ne connaîtraient pas encore votre univers, que leur diriez-vous afin de les inciter à le découvrir ? J’aime jouer avec les mots, mais aussi avec les sens. Il n’est pas rare que je pratique l’humour noir dans mes récits. J’applique l’adage « rions-en, avant d’en pleurer ». Ce que je préfère par-dessus tout c’est torturer mes personnages, plus mentalement que physiquement d’ailleurs. Quant à l’ambiance, c’est certainement le plus important. C’est pour cette raison que je relate souvent des histoires se déroulant au 18 et 19e siècle. Ce sont pour moi les époques du mystère absolu. Cela m’oblige à me documenter énormément. La plupart des lieux que je décris dans mes histoires existent ou ont réellement existé. L’exercice de tronquer la vérité historique est ce qui me satisfait le plus dans l’acte de l’écriture. Tout est propice pour renvoyer le lecteur à d’autres sujets. |
Date de l'interview : Octobre 2015 © Des encres sur le papier