Parlez-nous un peu de vous Johanna Almos...
D’où vous est venue cette passion
pour l’écriture ? J'ai commencé à écrire dès que j'ai su tenir un stylo. A sept ans, déjà, j'inventais des contes et rédigeais de courts poèmes. L'écriture me permettait de fuir un quotidien parfois difficile. Quels sont les auteurs qui vous ont inspiré(e) ? Lorsque j'ai eu huit ans, ma nourrice m'a offert Les fleurs du mal de Baudelaire. Évidemment, j'étais trop jeune pour comprendre le texte. Cependant, je le trouvais magnifique. Je savais qu'il détenait un secret qu'il me faudrait percer une fois adulte. Ça a été la rencontre littéraire de ma vie. L’événement qui a tout déclenché. Par la suite, j'ai découvert Neil Gaiman, Mélanie Fazi et Lionel Ray. Ces poètes des temps modernes ont encore renforcé mon amour du livre. Bien que je n'égalerai jamais leur talent, ils ont su me donner envie d'écrire. Parmi toutes vos histoires, de quel(s) personnages êtes vous le plus proche ? Écrire revient à parler de soi d'une manière ou d'une autre. De ses rêves, de ses peurs, des causes qui nous importent. Ainsi, je suis proche de tous mes personnages. Chacun d'eux est une part de moi, de la plus évidente à la plus secrète. Que racontait la première histoire que vous ayez écrite ? Pour être franche, je ne m'en souviens plus exactement, ça remonte tout de même à l'enfance. Je me rappelle surtout d'une adaptation horrifico-humoristique de Cendrillon écrite à l'âge de neuf ans. Adolescente, je composais principalement des paroles de chansons et des poèmes glauques. Mais le premier texte qui a retenu l'attention d'un éditeur s'intitule « Grossesse ». C'est une nouvelle fantastique qui aborde la stérilité et la folie. Il est paru dans l'anthologie Ténèbres, chez Dreampress en 2015. Quelle histoire à eu le plus de succès ? Je suis encore une jeune écrivaine. Aussi, je ne suis pas certaine que l'on puisse vraiment parler de succès. Cependant, j'ai été extrêmement touchée par les réactions qu'a suscité "Voodoo Child". Ce texte, paru dans un recueil caritatif, parle de la dépression post-opératoire. De nombreuses malades disent s'être retrouvées dans le personnage principal. Elles étaient heureuses de se sentir enfin comprises, de voir leur vécu exprimé. Partager une émotion, aider le lecteur à s'évader, à se sentir mieux : finalement n'est-ce pas cela le succès ? En tous cas, c'est la seule reconnaissance qui m'importe. Comment réagissez-vous face aux critiques négatives ? Fut un temps, l'opinion des autres m'importait beaucoup. Mais j'ai appris à ne plus y accorder autant de valeur. Ce que les autres disent et font n'est qu'une projection de leur propre réalité. En aucun cas, cela ne doit vous affecter. Comment vous sentez-vous à l’approche de la sortie d’un de vos livres ? A la fois heureuse et angoissée. Je suis ravie que mon travail soit terminé et qu'il ait suffisamment plu pour être publié. Mais j'ai beaucoup de mal à m'en séparer. D'une certaine manière, le partager, c'est y renoncer. C'est aussi accepter que le texte soit fini, qu'il n'y ait pas de retour possible. Or je voudrais toujours faire mieux. J'aimerais pouvoir modifier mon travail sans cesse jusqu'à la perfection. Mais arrive un moment où je dois le laisser partir. Je suis comme une mère dont l'enfant quitte le nid : déchirée et ravie. |
Avec quel(s) auteur(s) aimeriez-vous travailler ?
Je ne travaille qu'avec des personnes en qui j'ai toute confiance. En cela j'ai beaucoup de chance. Les éditions Otherlands regroupent des professionnels qui ont les mêmes valeurs. Évoluer à leurs côtés est un réel plaisir. Cela a-t-il été compliqué de faire publier votre premier manuscrit et comment cela s’est-il passé ? Là encore, j'ai eu beaucoup de chance. En 2014, lors d'un congé maladie, j'ai profité de mon inactivité forcée pour franchir le cap. J'ai envoyé quelques-unes de mes nouvelles SFF à trois éditeurs qui avaient lancé des appels à textes. Chacune d'entre elles a été retenue par une maison d'édition différente et publiée dans une anthologie. En fait, il suffisait d'oser. Avant de publier un livre, le faites-vous lire à des personnes de votre entourage ?Oui, toujours. Mon conjoint est mon premier lecteur, son avis compte beaucoup pour moi. Certains amis ont aussi accès à mon texte avant publication. Leurs conseils sont précieux. Si vous deviez publier un livre, quel genre serait-ce ? Mon premier ouvrage, Mémoires de corps, vient de paraître aux éditions Otherlands. Il s'agit d'un recueil de nouvelles fantastiques sur le thème du corps. Je voulais montrer qu'un sujet pourtant trivial pouvait avoir une dimension fantasmagorique. La chair est ce que nous avons de plus intime, de plus concret cependant, elle abrite nos fantasmes et nos terreurs. J'ai également écrit un roman qui aborde l'amour face à la maladie. Peut-être trop à contre courant dans une société qui rejette le handicap, il n'a pas séduit les éditeurs classiques. C'est pour cette raison que Loïc Lendemaine et moi-même avons décidé de créer NaOH éditions. Avec NaOH, nous voulons donner une chance aux auteurs anticonformistes d'être publiés. Avez-vous envie de publier un livre ou préférez-vous continuer d'écrire des nouvelles ? J'écris aussi bien des nouvelles que des romans. Peu importe le support, l'essentiel est de faire passer un message. Quels sont vos projets ? Actuellement, je travaille à un nouveau roman sur le thème de l'exclusion. Plus jeune, j'ai fréquenté le monde de la rue. Je veux montrer aux gens ce qu'est réellement ce milieu dont ils préfèrent tout ignorer. Après cela, j'aimerais écrire un roman fantastique. Entre le réel et l'imaginaire, je ne parviens pas à choisir. C'est pourquoi je butine les deux registres. Le monde est aussi bien ce que nous vivons que ce dont nous rêvons. Le décrire avec exactitude, c'est appréhender les deux facettes. Pour ceux qui ne connaîtraient pas encore votre univers, que leur diriez-vous afin de les inciter à le découvrir ? C'est une question difficile ! J'aurais tendance à me définir comme un écrivain social. J'essaie d'appréhender le monde dans ce qu'il a de plus vrai, de décrire une réalité sans fard. Qu'elle soit crue, sordide ou empreinte de pureté. Ce qui m'importe c'est de toucher le lecteur au plus profond. Et si je parviens à faire passer un message, à défendre une certaine idée de la justice, alors, je suis comblée. J'ignore si cela incitera vos lecteurs à me découvrir mais je suis ainsi. |
Date de l'interview : Mars 2016 © Des encres sur le papier