Parlez-nous un peu de vous Laurent Scalese...
D’où vous est venue cette passion
pour l’écriture ? Une passion qui remonte à loin, à l’enfance. Lorsque j’ai vu le film "La planète des singes" (de Franklin Schaffner), à l’âge de neuf ans, il s’est passé quelque chose en moi. Il y a eu comme un déclic. J’ai enchaîné par la lecture du roman éponyme de Pierre Boulle, ce fut la révélation, en ce sens que les mots étaient bien plus puissants que les images. J’ai aussitôt eu envie d’écrire, une envie irrépressible. Je me suis assis à mon bureau, j’ai pris un stylo-bille, j’ai ouvert un cahier à spirale vierge et j’ai raconté l’histoire de deux extraterrestres pacifiques arrivant sur la Terre, mais bien mal accueillis par nos semblables… Depuis, je n’ai jamais cessé de lire et d’écrire, car pour moi l’un ne va pas sans l’autre. Quels sont les auteurs qui vous ont inspiré(e) ? Je ne sais pas si on peut parler d’inspiration mais certains écrivains m’ont transmis le virus de l’écriture et marqué à vie. Boulle, évidemment.Conan Doyle (grâce à Sherlock Holmes, que d’exquis moments de lecture), Agatha Christie (la reine inégalée et inégalable du whodunnit), Richard Matheson (mon maître à moi), Ray Bradbury, Philip K. Dick, Ira Levin, Jack Finney, Isaac Asimov, Dino Buzzati, Anthony Burgess, Raymond Chandler, Dashiell Hammett, William Irish, Jim Thompson, Philip Roth et quelques autres. Sans oublier les "classiques" dont les histoires, les personnages et le style sont d’une modernité étonnante : Balzac, Maupassant, Hugo… Tous ces auteurs, je ne les remercierai jamais assez pour le plaisir que leurs romans m’ont procuré. Parmi tous vos romans, de quels personnages êtes-vous le plus proche ? Pourquoi ? Il y a un peu de moi dans chaque personnage de mes romans. Je crois qu’il en est ainsi pour chaque écrivain. S’inspirer de la vraie vie donne de la profondeur, de la pertinence, du réalisme, de la lucidité au récit. Mais cela reste de la fiction, raconter ma vie, à la première personne, ne m’intéresse pas du tout. Le nombrilisme narcissique, très peu pour moi. Certains s’y complaisent, tant mieux pour eux… Si je devais citer deux personnages de mes livres que j’affectionne particulièrement, il y aurait Élie Sagane, le flic de la Crim’ qui est le héros de mon premier roman, "Le Samouraï qui pleure", et Sage Gardella, le flic d’origine indienne, héros "Des pas sous la cendre". Comment vous sentez-vous à l’approche de la sortie d’un de vos livres ? Entre excitation et nervosité, c’est normal. Vous avez accouché de votre bébé de papier, vous espérez qu’il plaira au plus grand nombre. Ce n’est jamais gagné, d’autant plus qu’après la sortie, le roman ne vous appartient plus. Son sort, encore moins. C’est à la fois magique et angoissant. Comment réagissez-vous face aux critiques négatives ? En étant publié, vous vous exposez au risque d’être critiqué. Cela fait partie du jeu. Tant que la critique concerne le roman, tant qu’il ne s’agit pas d’une attaque en règle contre la personne – certains confondent tout -, je ne trouve rien à redire. S’il y a une chose que j’ai apprise au fil des ans, c’est qu’on ne peut pas plaire à tout le monde. Et heureusement, ce serait terrible. La pensée unique, on sait où cela peut mener. |
Avec quel(s) auteur(s) aimeriez-vous travailler ?
Malheureusement pour moi, la plupart des écrivains avec qui j’aurais aimé travailler ne sont plus de ce monde. Ce sont ceux que j’ai cités précédemment. Il en reste quand même un : Stephen King. Je pense que mes confrères et moi-même aurions beaucoup à apprendre de lui. Ça m’amuse beaucoup quand les médias comparent certains écrivains contemporains à King : il n’y a qu’un seul Stephen King. Il suffit de lire "22/11/63", son dernier roman, un chef-d’œuvre absolu, pour s’en rendre compte. Cela a-t-il été compliqué de faire publier votre premier manuscrit et comment cela s’est-il passé ? Un premier essai, en 1996, n’a rien donné. Il s’agissait d’un roman de science-fiction que j’ai envoyé à toutes les maisons d’édition susceptibles d’être intéressées. Les réponses négatives se sont empilées sur mon bureau. La deuxième tentative fut la bonne. En 1999, après avoir terminé « Le samouraï qui pleure », je l’ai imprimé en trente ou quarante exemplaires – on ne le dit pas souvent, mais c’est un sacré budget - que j’ai envoyés à des éditeurs. Et là, quatre jours plus tard, j’ai reçu un appel d’un directeur littéraire. Emballé par le texte, il m’a proposé un rendez-vous. Le rêve devenait réalité. À cette époque, j’ignorais encore que ce ne serait pas toujours une partie de plaisir, qu’il me faudrait travailler très dur, me remettre souvent en question, faire en sorte de ne pas me répéter, me renouveler, etc. J’ai toujours eu la hantise d’écrire le même livre toute ma vie, d’où les doutes, les interrogations, la recherche permanente de nouveaux domaines à explorer. Certains écrivent toujours le même roman, à quelques variantes près, parfois en connaissance de cause, par peur de déplaire, de perdre des lecteurs. Personnellement, ça m’angoisse. Avant de publier un livre, le faites-vous lire à des personnes de votre entourage ? Toujours à ma compagne, elle me suit et me lit depuis mes débuts, elle a le recul nécessaire, elle sait comment m’aborder pour me dire certaines choses, pour faire certaines critiques. Ensuite, quand j’estime que le manuscrit est le plus abouti possible, je l’envoie à l’éditeur. Je déteste envoyer un brouillon, un premier jet écrit vite fait. Je verrouille toujours l’histoire et m’assure que tout est en ordre dans le texte : syntaxe, grammaire, orthographe, répétitions, etc. Bref, je rends une copie propre car j’estime que c’est un métier qu’il faut faire avec professionnalisme et respect. Et puis, la langue est un petit miracle, une si belle chose qu’on doit prendre bien soin d’elle. Quels sont vos projets ? "Cherif ", une série policière très fun que j’ai co-créée et co-écrite pour France 2, sera bientôt diffusée. D’autres projets audiovisuels sont en cours. Et je travaille sur mon prochain roman, mon "monstre", comme je l’appelle. Jamais je n’ai autant travaillé un manuscrit. Il y aura tout : suspense, action, frissons, angoisse, émotion, amour… Je n’ai rien laissé au hasard, et surtout pas les personnages, qui sont le cœur de toute histoire. Pour ceux qui ne connaîtraient pas encore votre univers, que leur diriez-vous afin de les inciter à le découvrir ? J’ai toujours écrit avec mon cœur et mes tripes, parce que l’écriture est une passion qui m’apporte tellement que j’aime lui rendre la pareille. Le roman policier et le thriller ont ma préférence car ils sont un miroir de la société et des pulsions, qu’elles soient refoulées ou sublimées. Mais plus que tout, mes univers privilégient les émotions, car nous aimons tous en ressentir, nous avons besoin d’en ressentir, ce sont elles qui transcendent le quotidien et nous font nous sentir vivants. |
date de l'interview : Août 2013 © Des encres sur le papier