L'esquisse de Léo Gontier ...
Vous rappelez-vous du 1er dessin que vous avez "croqué" ?
Mon premier dessin, aussi loin que je m’en souvienne, devait être une maison hantée, dessin que j’ai par la suite reproduit à maintes reprises, car tout jeune, j’étais fan des histoires de fantômes et de monstres en tout genre (j'adorais le dessin animé Scoubidou), et mon père n’y est surement pas pour rien ! Il n’y avait pas d’ailleurs qu’un simple manoir abandonné dans mon dessin, j’y ajoutais toujours une ou eux silhouettes aux fenêtres, un arbre mort, quelques tombes ici et là et bien entendu une pleine lune géante au coeur de la nuit ça va de soi ! Avez-vous pris des cours de dessin ou êtes-vous autodidacte depuis le début ? Tout petit, je dessinais beaucoup, jusqu’à ce que les jeux vidéos me volent tout mon temps ! Et puis, à 18 ans, alors que le bac approchait à grand pas, je me suis remis au dessin avec l'objectif d'en faire mon métier. Au début j’ai commencé avec des cours de modèle vivant dispensés par la ville Dijon, en même temps que je révisais pour mon baccalauréat. Je me suis ensuite orienté dans des études en accord avec mes goûts et j'ai obtenu en 2016 un BTS design graphique spécialité multimédia. Pendant ces deux années de BTS à Chaumont, je dessinais en dehors des cours de manière plus assidue et plus réfléchie. En octobre 2016 j’intégrai la prestigieuse école de dessin Emile Cohl à Lyon, pour effectuer une première année dans le cursus de dessinateur praticien. Les cours étaient très académiques. Il y avait notamment du modèle vivant, mais aussi du dessin d’objet, de l’anatomie, de la BD, de la sculpture, de la perspective, de la peinture, etc… A l'issue de cette première année, j’ai décidé de changer de voie, toujours à Emile Cohl, pour m’orienter vers la création d’images numériques en 2D et en 3D et depuis la rentrée 2017, je suis en première année du cursus de dessin 3D, qui dure trois ans. Quelle illustration, illustrateur vous a donné envie de faire ce métier ? Etant tout petit je baignais déjà dans le monde de la bande dessinée. Mon père possède une collection assez importante des grands classiques du genre. J’ai découvert alors Hergé, Jacobs, Franquin, Uderzo et d’autres encore. Les artistes des studios Disney, qui ont bercés mon enfance avec de grands films d’animations comme "Tarzan" (Ah ! les coups de crayon de Glen Keane !) , "Atlantide l'empire perdu" de Gary Trousdale et Kirk Wise ou l’extraordinaire "Taram et le Chaudron Magique" de Richard Rich et Ted Berman. Pour rester dans l'animation, je réserve aussi une mention spéciale à Brad Bird et son inoubliable "Géant de fer", que j'ai regardé en boucle à une époque. Tous ces artistes talentueux ont contribué à enrichir mon univers personnel et m'ont donné l’envie à mon tour de créer et de raconter des histoires au travers de mes dessins. Avez-vous un genre de prédilection (fantasy, horreur…) ou êtes-vous un touche-à-tout ? Je ne pense pas avoir de genre de prédilection, je suis plutôt un touche à tout. Tout petit c’était les histoires de monstres, puis j’ai découvert bien d’autres univers fascinants comme le western spaghetti des années 60/70 qui m’ont marqué par la musique d’Enio Morricone, leur ambiance visuelle et leur mise en scène à la fois graphique (les plans très rapprochés de Sergio Leone), et leur mélange si particulier de réalisme et d'outrance baroque. Je suis également un grand fan d’Heroic Fantasy, qui reste à ce jour l’un de mes genres préférés. Je pense que le Seigneur des Anneaux a changé ma vision du monde, ça m’a bouleversé. Je suis tombé amoureux de cet univers si particulier, gigantesque et incroyable dans lequel je pioche sans cesse de nouvelles idées. Ont suivi dans le même style Harry Potter, Willow ou encore Donjons et Dragons. Les jeux vidéo m’ont également offert toute une nouvelle imagerie très riche et très variée. J’adore aussi l’horreur avec les films de la Hammer, la science-fiction que j’ai principalement découvert avec la saga Star Wars, autre univers visuel qui ne m’a pas laissé indifférent tant je le trouve unique et intemporel. Avoir une culture littéraire, cinématographique et vidéoludique me semble être indispensable pour concevoir des illustrations crédibles, faisant références à des mondes concrets, réfléchis, travaillés, où le spectateur se laisse transporter par l’auteur, qui peut alors y véhiculer ses propres messages et ses émotions. Cela est évidemment valable dans bien d’autres domaines de la création artistique. En moyenne, combien de temps passez-vous sur une illustration ? Tout dépend du type d’illustration. En moyenne je passe plusieurs heures voire plusieurs jours sur une même illustration. S’il s’agit d’une réalisation avec une technique traditionnelle, comme de la peinture, le travail est, en ce qui me concerne, plus laborieux. En revanche si je travaille sur photoshop, la peinture dite numérique me prendra moins de temps car contrairement à la peinture sur papier ou sur toile où l’on n’a pas le droit à l’erreur, l’informatique permet de corriger facilement son travail. Pour les simples crayonnés, c’est beaucoup plus rapide. Evidemment, si le dessin doit être très poussé et approcher d’un rendu plus réaliste, il sera logiquement plus long à concevoir. |
Pour quelles œuvres illustrez-vous ? (Roman, BD, affiche…)
Pour le moment j’ai essentiellement produit des illustrations pour une affiche, des bannières de site web, des couvertures de livres et un jeu de rôle, ce qui, à mon niveau, n'est déjà pas si mal. On peut dire que je n’exerce pour le moment que dans le domaine de l’édition papier, un des secteurs d’activité de prédilection pour un jeune diplômé en design graphique. C’est toujours intéressant de se diversifier lorsque l’on s’engage dans un métier de créatif, car chaque domaine ouvre sur de nouvelles perspectives de réflexion et de nouveaux mécanismes de travail qui enrichissent les travaux pour les commandes ultérieures. Cela permet aussi une meilleure connaissance du monde professionnel des arts appliqués et une plus grande ouverture d’esprit. Toute expérience est bonne à prendre et on en apprend tous les jours, alors si d’autres projets se présentent à moi j’ai tout intérêt à emprunter des chemins différents au fil de ce qui pourrait être une future carrière d’illustrateur professionnel ! Pour quel(s) auteur(s) aimeriez-vous illustrer ? J'apprécie beaucoup François Fierobe, dont j'ai réalisé la couverture de son roman "Les Spectres d’Eiffel", paru dans la collection LoKhale des éditions la Clef d’Argent. Je trouve que c’est un excellent auteur, sa plume me transporte dans un autre monde et j’admire beaucoup son travail. Si un jour j’avais la possibilité de créer plusieurs visuels pour ses prochains textes, ce serait merveilleux ! J'aimerai aussi beaucoup travailler pour Alexandre Astier. C’est une des personnes qui m’a donné envie de créer à mon tour des histoires et surtout de partager ce que je fais au travers de mes dessins. J’ai énormément de respect pour cet immense artiste et si je pouvais ne serait-ce que réaliser un petit visuel pour ses éventuels prochains bouquins ou même pour d’autres supports ce serait un énorme plaisir et une grande fierté. L’espoir fait vivre comme on dit ! Quel support utilisez-vous ? (Papier, ordinateur,…) J’utilise plusieurs types de supports, aussi bien du numérique que du traditionnel. Car il est tout aussi important d’être en adéquation avec les nouvelles technologies que de maîtriser le dessin traditionnel sur le bon vieux papier et avec les bons vieux crayons. Au final le médium importe peu tant que le résultat est là. Aujourd’hui il n’est pas utile de savoir dessiner sur tablette graphique, via photoshop, pour être un bon illustrateur. Seulement lorsque l’on souhaite avoir toutes les cartes en main, il peut être instructif de toucher à tout type de support afin de se diversifier et de se voir offrir davantage d’opportunités. Que préférez-vous illustrer ? (Personnages, animaux, paysages Il y a de cela quelques années j’aurais répondu à cette question en ne jurant que par le dessin de personnage ! Mais après réflexion je me suis aperçu qu'un dessin ne pouvait pas se résumer uniquement à un ou deux personnages sur un fond. Il faut les mettre en scène, pousser leur concept au maximum afin qu’ils paraissent crédibles, leur imprimer des émotions, les inclure dans des histoires afin de donner plus d’informations aux spectateurs. C’est ainsi que petit à petit, en particulier depuis mon entrée à Emile Cohl, je me suis intéressé au dessin d’environnement, aussi appelé « concept art » dans le milieu du jeu vidéo. Il s’agit de créer des environnements détaillant un univers bien précis. L’intérêt est de raconter une histoire par la mise en scène, la gestion des sources de lumières, la disposition des différents éléments composant l’image, qu’il s’agisse de buildings géants ou de grands arbres sinistres. Ce type d’illustration se retrouve dans d’autres domaines, comme bien entendu dans l’illustration classique, ce qui en fait un sujet particulièrement intéressant et instructif. Comment choisissez-vous l’illustration pour un roman ? Lorsque j'ai le texte, je le lis et je tombe fatalement sur une scène qui m'inspire graphiquement. Mais il arrive que je travaille sans avoir le texte. Dans ce cas, il me faut un maximum d’informations : résumé ou scénario, thèmes abordés, quelques détails que l'auteur veut mettre en valeur ou qui jouent un rôle important ou emblématique. Ensuite je cherche des références ou des éléments visuels en rapport avec l'univers du livre. Grâce à toutes ces informations, je peux établir un plan de construction pour mon illustration, définir les éléments qui la composent et comment les répartir équitablement dans l’espace de travail qui m’est donné, à savoir les dimensions de la couverture. Qu’il s’agisse de photomontage ou de dessin, les problématiques restent les mêmes : savoir transcrire graphiquement le thème, l’esprit et le ton du roman et capter l’attention du lecteur potentiel pour lui donner envie d’ouvrir l’ouvrage, et bien sûr, de le lire. Il faut connaître les codes de mise en page, avoir un sens aigu de l’image et de la composition. Ce que j’apprécie dans ce métier c’est le fait de donner du sens aux images, faire voyager les spectateurs, les immerger, les transporter dans des mondes fantastiques et leur donner l’envie de les découvrir. Devenir un conteur, divertir, faire rêver, raconter des histoires, nourrir l’imagination des gens et bien sûr, faire plaisir et se faire plaisir. |