Parlez-nous un peu de vous Marc Levy...
D’où vous est venue cette passion
pour l’écriture ? J'étais un enfant très timide, pudique. L'écriture permet d'exprimer à voix basse ce que l'on n’arrive pas à dire à haute voix. Mon père, qui était éditeur de livres d’art et très grand lecteur m’a transmis son amour de la lecture, des beaux textes et des grands écrivains. L'envie d'écrire s’est concrétisée tardivement, mais plus j’écris et plus j’aime écrire. Quels sont les auteurs qui vous ont inspiré(e) ? Ils sont si nombreux, français et anglo-saxons, Salinger, Gary, Hemingway, King, Prevert, Hugo, Giono... Parmi tous vos romans, de quels personnages êtes-vous le/la plus proche ? Pourquoi ? De Daldry, probablement, je ne sais pas pourquoi, disons que j'aurai vraiment aimé l'avoir pour ami et parler de longues heures avec lui , assis sur un banc face au Bosphore ou à la Tamise. Je me sens souvent aussi très proche des personnages que je viens de quitter, lorsque je mets un point final à l'un de mes romans. Comment vous sentez-vous à l’approche de la sortie d’un de vos livres ? Envahi de doutes et gagné par le Trac. Est-ce que le livre est vraiment fini, qu'est-ce que j'ai raté ou mal raconté, pourquoi le publier ? Comment réagissez-vous face aux critiques négatives ? Je leur suis éternellement reconnaissant. Rien n'est plus joyeux que de savoir que l'on a encore tant de choses à apprendre ; l'autosatisfaction vous fait irrémédiablement vieillir. Avec quel(s) auteur(s) aimeriez-vous travailler ? Avec Romain Gary, j'aurai aimé pouvoir apprendre de lui, partager des conversations. Avec aussi quelques auteurs contemporains. Cela a-t-il été compliqué de faire publier votre premier manuscrit et comment cela s’est-il passé ? Mon passage à l'écriture est un peu particulier et la chance y est pour beaucoup. Quand j'ai commencé à écrire ce qui deviendrait "Et si c'était vrai", je n'avais pas l'intention d'en faire un roman, et je pensais encore moins qu'il serait publié. J'avais écrit cette histoire pour mon fils, ou plutôt pour l'homme qu'il deviendrait un jour. Mon idée était de lui remettre le manuscrit quand il aurait l'âge que j'avais en l'écrivant. À travers ce roman, je voulais lui dire d'aller au bout de ses rêves de ne laisser personne l'en déposséder. Poussé par ma sœur scénariste, j'ai envoyé le manuscrit aux Éditions Robert Laffont, qui m'ont répondu, huit jours après, vouloir publier le livre. Quelques semaines plus tard, Steven Spielberg me téléphonait pour m'annoncer qu'il voulait adapter mon histoire au cinéma. J'ai alors démissionné du cabinet d'architecture que je dirigeais pour me consacrer à l'écriture. Depuis, j’ai écrit 13 autres romans et je ne cesse de me rappeler que j’ai beaucoup de chance. Avant de publier un livre, le faites-vous lire à des personnes de votre entourage ? À ma femme, à mon agent littéraire qui est aussi ma meilleure amie, à Emma Peel, une ancienne agente des services secrets britanniques, reconvertie dans la lecture et la correction de textes. Quels sont vos projets ? Deux trois recettes de cuisine et un nouveau roman. |
Pour ceux qui ne connaîtraient pas encore votre univers, que leur diriez-vous afin de les inciter à le découvrir ?
Lecture et écriture sont pour moi synonymes de liberté. Une liberté rien qu'à soi, un moment privilégié où l'on est en relation intime avec un livre. Mes lectures sont très diverses, je n'ai jamais voulu restreindre mon plaisir de lire à un seul genre ni jamais voulu écouter les censeurs de la lecture, ceux qui vous disent ce qu'il faut lire ou ne pas lire. Et il en est de même pour l'écriture, j'ai essayé, de roman en roman, de ne jamais raconter deux fois la même histoire, de ne jamais m'enfermer dans un genre. Parfois comédie, fantastique ou d'autre fois roman d'aventures ou thriller, je prends plaisir à alterner les registres. J'aurais trop peur de m'ennuyer et d'ennuyer ceux qui ont la générosité de me lire en cultivant un seul genre. Alors j'explore à chaque livre de nouveaux horizons, et il me reste encore bien des territoires à découvrir.... Mais il y a deux points communs à tous mes romans, ils ne sont pas contemplatifs, tous racontent une histoire et cette histoire n'a d'autre raison d'être que de mettre en avant les personnages qui la composent. Chaque nouveau roman est pour moi l'occasion de partir à la rencontre de ces nouveaux personnages qui deviendront des amis. Est-ce que le fait d’être devenu un auteur à succès très célèbre vous met une pression supplémentaire pour vos prochains romans ? Je vais être honnête, 29 millions de lecteurs, c’est vertigineux et magique à la fois, cela donne la force de ne compter ni les jours ni les nuits passés à écrire et réécrire sans cesse ; c'est aussi le plus grand bonheur qui puisse arriver à un romancier. Mais cette pression, dont vous parlez, ne relève pas du nombre de lecteurs, mais de l'exigence que l'on s'impose, de livre en livre. Cet appétit de progresser, commun à toutes celles et ceux qui aiment leur métier, quel qu'il soit, cette envie de repousser ses propres limites. N’avez-vous pas peur de rechercher le succès avant de rechercher la qualité ? Alors, non, vraiment pas, mais les deux ne sont pas toujours en opposition. Je choisis rarement de retourner diner dans un bistrot parce que la cuisine y est mauvaise. N’avez-vous pas peur de prendre la grosse tête ? Aucun risque, j'ai été élevé par des parents qui vouaient un culte à l'humour et à l'autodérision. Et puis, j'ai eu l'occasion de voir les effets secondaires du syndrome de la grosse tête chez certaines personnes et comme dirait ma sœur, berk ! Est-ce que le regard de vos proches a changé ? Depuis que je suis romancier, mes amis ne me prennent plus jamais au sérieux quand je leur dis que je travaille. Que ressentez-vous de voir l’un de vos romans adapté cinématographiquement ? Lorsqu'un roman est adapté, l'histoire est confiée à d'autres auteurs, scénaristes, réalisateurs, dont le talent ne peut être contraint à filmer les pages d'un livre. Les modifications structurelles sont inéluctables, un roman offre des heures de lectures, lorsqu'un film est limité à environ 1h30. L'histoire racontée dans un livre ne souffre d'aucune contrainte budgétaire, un film oui. La fidélité de l’adaptation ne dépend pas tant des coupes qui seront faites, mais de la volonté, ou non, du réalisateur, de coller aux personnages du roman. Ce fut le cas pour "Mes Amis mes amours" et "Où es-tu ?", ce ne fut pas le cas pour "Et si c'était vrai". |
Date de l'interview : Septembre 2013 © Des encres sur le papier
Pour en savoir plus...
Si vous souhaitez en savoir plus sur l'excellent Marc Levy, découvrez ou redécouvrez l'émission "La Parenthèse inattendue" du 27 mars 2013. Invité aux côtés du chanteur M.Pokora et de la comédienne Marie-Christine Barrault, M.Levy s'était confié à Frédéric Lopez sur son enfance, son parcours, sa passion pour l'écriture et sa rencontre avec Steven Spielberg...