Parlez-nous un peu de vous Solène Bakowski...
D’où vous est venue cette passion
pour l’écriture ? C’est une passion qui me suit depuis très jeune. Dès que j’ai su former des lettres, j’ai commencé à vouloir raconter des histoires. A sept ans, j’écrivais des pièces de théâtre que je faisais jouer à mes camarades devant toute la classe. Puis, j’ai essayé de lancer un journal lorsque j’étais en CM2. Adolescente, comme beaucoup de jeunes filles, c’est dans la rédaction d’un journal intime que je me suis lancée. Je ne saurais pas dire de quoi est venue cette envie d’écrire que je trimbale depuis toujours. C’est peut-être comme aimer le chocolat ou pas, comme aimer chanter ou pas. Ca me dépasse un peu à vrai dire. Quels sont les auteurs qui vous ont inspiré(e) ? J’éprouve un grand intérêt pour Amin Maalouf car j’aime sa façon de décrire les ambiances, les odeurs. Lorsqu’on ouvre un de ses romans, dont les histoires se passent en général à des milliers de kilomètres et à une époque lointaine, on ne peut qu’être emporté. Avec lui, on se promène dans les marchés, on caresse les étoffes, on sent la brise du vent sur son visage. C’est un voyage à chaque fois, cela tient presque de la magie. Prenez "Samarcande" ou "Léon l’Africain" : vous voici déjà dans l’avion. J’aime aussi beaucoup Erik Orsenna et Antoine de Saint-Exupéry pour le style qui est le leur. Ce n’est pas de l’écriture à ce niveau-là, c’est de la musique. Enfin, Stephen King est un maître. Si, à 15 ans, j’aimais beaucoup ses romans, la lecture de l’essai "On Writing : a Memoir on the Craft" a radicalement changé ma façon de penser l’écriture et le rapport à la fiction. De manière plus anecdotique, il y a eu aussi "Si par une nuit d’hiver un voyageur" d’Italo Calvino, lu par le biais d’un professeur de lettres un peu décalé. Ce livre m’a montré que l’on pouvait jouer avec un lecteur. Une vraie leçon de frustration ! Parmi tous vos romans, de quels personnages êtes-vous le plus proche ? Pourquoi ? Dans "Parfois on tombe", Sarah, la narratrice, est une femme dont l’existence ressemble beaucoup à la mienne : mariée, mère de famille, enseignante (ce que j’étais au moment de l’écriture). Pourtant, j’éprouve plus de sympathie envers Anna-Marie Caravelle, l’héroïne d’ "Un sac". C’est une drôle de fille qui, aux yeux du monde, commet des actes monstrueux alors que finalement, elle a en elle une humanité bien plus grande que la majorité des personnages qu’elle va croiser ; les apparences sont parfois trompeuses. Comment vous sentez-vous à l’approche de la sortie d’un de vos livres ? J’éprouve des sentiments ambivalents. Je suis partagée entre la joie de voir l’aboutissement d’un travail, l’excitation de la promotion à venir mais aussi l’angoisse de laisser partir ce qui m’a tenu en haleine pendant de longs mois, les personnages qui m’ont accompagnés et puis la peur que les retours de lecture ne soient pas à la hauteur de mes espérances. Comment réagissez-vous face aux critiques négatives ? Je réagis en deux temps : pour être honnête, je dois avouer que ma première réaction est un peu épidermique car les critiques négatives me blessent toujours un peu. Ensuite, les jours passent, le calme revient et j’ai tout loisir de réfléchir aux critiques qui m’ont été faites et qui sont, la plupart du temps, très bien vues. Je peux alors reconsidérer mon texte et me servir de ce qui en a été dit pour essayer d’enrayer tel ou tel défaut au cours de l’écriture d’une nouvelle histoire. Je pense qu’un auteur est toujours son plus mauvais lecteur. L’écriture apprend la modestie, de gré ou de force. |
Avec quel(s) auteur(s) aimeriez-vous travailler ?
Travailler, je ne sais pas car j’ai l’impression, peut-être à tort d’ailleurs, que l’écriture est forcément une activité très solitaire. En revanche, j’aimerais, si l’occasion m’en était donnée, échanger avec des auteurs très divers tels que Stephen King, Mo Hayder, Karine Tuil ou encore Mo Yan Cela a-t-il été compliqué de faire publier votre premier manuscrit et comment cela s’est-il passé ? "Parfois on tombe" est sorti aux éditions Favre en janvier 2014. J’ai envoyé beaucoup de manuscrits à des éditeurs et ai reçu en retour tout un tas de réponses impersonnelles. C’est douloureux, et ce d’autant plus qu’on ne sait pas ce qui pêche. Et puis on finit par recevoir un message d’encouragement et, finalement, un beau jour, c’est un message très intéressé qui arrive sur votre boîte mail. Sophie Rossier, directrice éditoriale des éditions Favre, m’a répondu au bout de 2 jours qu’elle trouvait le texte poignant et qu’elle souhaitait en savoir plus sur moi. S’en est suivi un échange de mails puis une rencontre avec Pierre Favre à Paris. Quelques mois plus tard, je tenais le livre entre mes mains. Pour "Un sac", j’ai opté pour l’auto-édition. C’est grisant car la liberté que cela laisse aux auteurs est immense. Toutefois, il faut être vigilant car c’est aussi un piège. En effet, on peut être tenté de publier vite –sans barrière, le texte est aussitôt écrit, aussitôt disponible à la lecture- trop vite même alors qu’un texte a besoin de mûrir. Et les histoires que l’on peut rédiger n’ont toutes pas vocation à être publiées. Il faut savoir faire des choix. Dans l’auto-édition, pas de garde-fou ; sans éditeur, c’est à l’auteur d’avoir la distance nécessaire pour laisser son ego de côté. Mais ce n’est pas simple et on lutte contre soi-même, la raison contre la tentation en quelque sorte. Avant de publier un livre, le faites-vous lire à des personnes de votre entourage ? Toujours. Et je m’arrange pour le donner à lire à des personnes très différentes en qui j’ai toute confiance. Mon mari, en particulier, est capable de jugement sans appel. Il a un don pour pointer les incohérences et ne se gêne pour me dire que telle ou telle scène ne tient pas debout. Mais je ne suis pas tous les conseils aveuglément, loin de là. Pour les prendre en compte, j’ai besoin d’être d’accord avec ce qui est reproché à l’histoire, d’être convaincue par le bien-fondé de la critique. Quels sont vos projets ? J’écris, encore et toujours. Actuellement, je cherche un éditeur pour un texte terminé depuis plus d’un an. A vrai dire, forte de mes deux expériences d’édition, j’hésite à le publier en auto-édition. En parallèle, je termine l’écriture d’un roman d’anticipation, genre que je n’imaginais pas embrasser un jour. Pour ceux qui ne connaîtraient pas encore votre univers, que leur diriez-vous afin de les inciter à le découvrir ? J’essaie avant tout de raconter des histoires, de faire voyager, de faire ressentir. Les émotions sont au cœur de ce que j’écris. Si, dans le métro, la lecture d’un de mes textes peut permettre à quelqu’un de s’évader, alors c’est gagné. Je n’ai pas d’autre ambition que celle-ci. |
Date de l'interview : Mars 2015 © Des encres sur le papier